Pour la dignité des Roms et des gens du voyage !

Appel interorganisationnel, signé par Pierre Tartakowsky, président de la LDH

Comme chaque année depuis 2010, l’été a marqué le début de violentes attaques racistes contre les Roms étrangers et les gens du voyage, citoyens français, qui s’accélèrent avec l’entrée dans la campagnes des élections municipales.



Cette année, c’est Jean-Marie Le Pen qui a lancé les hostilités en juillet en qualifiant la présence de Roms à Nice d’« odorante » et d’« urticante », avant que Christian Estrosi ne joue la surenchère en lançant un « appel à la révolte », véritable appel à la haine, contre les gens du voyage. Gilles Bourdouleix a poursuivi cette saison de la haine en regrettant que l’extermination des tsiganes par les Nazis n’ait pas été totale, puis Régis Cauchet, maire de Croix, a renchéri dans l’escalade ignominieuse en soutenant par avance les meurtriers de Roms, avant que Nathalie Kosciusko-Morizet n’alimente la stigmatisation nauséabonde et que Bernard Debré ne se vautre dans les déclarations racistes les plus outrancières.

Cette haineuse déliquescence du débat public est la conséquence de la stigmatisation dont les les Roms et les gens du voyage ont continuellement été la cible par Nicolas Sarkozy et du fait que la logique impulsée alors n’ait pas été inversée depuis.
Par bien des aspects en effet, la politique menée aujourd’hui à l’encontre des Roms est la poursuite de celle menée par Sarkozy.

Tout d’abord, exemple le plus marquant, la violente et absurde politique d’expulsions : depuis mai 2012, c’est l’équivalent de la totalité des 15 000 à 20 000 Roms étrangers présents sur le territoire national qui ont été expulsés de leurs lieux de vie.
Violente, car cette politique entraîne traumatismes psychologiques, précarité sociale et déscolarisation. Absurde car elle a pour présupposé leur fantasmatique mais irréel nomadisme et pour conséquence l’aggravation de la situation sur le terrain, sans offrir aucune perspective de solutions.
De nouveau, ces populations miséreuses et discriminées, cibles de nombreux stéréotypes éculés et de représentations stigmatisantes, sont instrumentalisées à des fins politiques. Loin de rétablir l’ordre républicain, cette politique entraîne plus d’injustice et plus de désordre, d’autant plus que l’obligation de toujours proposer des solutions de relogement, promesse électorale de François Hollande et mesure-clef de la circulaire interministérielle du 28 août 2012, n’est pas respectée.

Un terme doit être enfin mis à cette absurde et violente politique d’expulsions !

Ces actions sont en lien avec une non-rupture des discours. En effet, s’il n’y a heureusement pas eu de nouveau Discours de Grenoble, de nombreuses déclarations, venant de différents bords politiques, s’inscrivent dans la même veine. Par exemple, celles qui affirment que « les Roms ne souhaitent pas s’intégrer en France pour des raisons culturelles » et qu’ils ont « vocation à vivre en Roumanie » ont des relents nauséabonds. Elles signifient qu’il serait bien inutile d’intégrer des individus qui ne seraient que de passage dans notre pays, alors que ces Européens sont chez eux en France.
Elles favorisent les silences qui accueillent les passages à l’acte violents, comme l’agression quasi-mortelle d’un Rom en juillet à Saint Denis ou la ratonade anti-Roms à Marseille en septembre 2012, alors justifiée et soutenue par la sénatrice-maire Samia Ghali.
Il est urgent qu’un discours républicain fort soit enfin porté par les plus hautes autorités de l’Etat, afin de rétablir le respect des valeurs de la République.

Ces actions sont également en lien avec une non-rupture des visions : la « Stratégie nationale d’intégration » des Roms, qui guide officiellement l’action du gouvernement, reste celle élaborée par Sarkozy. Par conséquent, ce sont des dizaines de millions d’euros du budget européen destinés à des projets d’insertion qui ne sont pas utilisés.
Il est impératif qu’une stratégie digne de ce nom soit enfin définie, en concertation avec la société civile et dans une perspective d’intégration. Régler ces problèmes ne demande pas des moyens supplémentaires, mais simplement une volonté politique nette.
La loi Alur sur le logement, qui fait notamment entrer l’habitat nomade des « gens du voyage » dans le droit commun, est à ce titre un exemple : préparée dans la concertation, elle montre comment il est possible de résoudre concrètement les problèmes les plus exposés médiatiquement.

Un certain renoncement politique pourrait aussi entraîner le maintien de la discriminatoire loi de 1969.
Héritière de celle de 1912 relative au contrôle des nomades, qui avait notamment instauré des carnets anthropométriques et permis la persécution des tsiganes en France pendant la Seconde Guerre mondiale, très partiellement censurée l’année dernière par le Conseil Constitutionnel, la loi de 1969 oblige toujours les gens du voyage à posséder des passeports intérieurs (titres de circulation) à faire viser régulièrement par les forces de l’ordre, et impose des quotas de population (3% maximum par commune).

Alors qu’elle a été officiellement présentée, la loi de suppression intégrale de la loi de 1969 pourrait voir son examen et son vote être repoussés à après les cantonales de septembre, autrement dit aux calendes grecques. En effet, la gauche, qui porte cette initiative, ne sera alors probablement plus majoritaire au Sénat, rendant impossible de fait son adoption. Ceux qui instrumentalisent les peurs et les haines contre les gens du voyage auraient alors gain de cause. La campagne des municipales ne doit pas être un alibi pour les reculades démocratiques ! La loi de 1969 doit être intégralement supprimée, c’est une urgence républicaine !
C’est pour porter ensemble toutes ces revendications marquées du sceau de la dignité et de l’égalité que nous vous engageons à nous rejoindre dimanche 6 octobre, place de la Bastille à Paris simultanément avec 15 pays, pour la troisième édition de la « Roma Pride – Jour pour la dignité des gens du voyage » !

Liste des signataires

Paul Max Morin, Directeur Exécutif du Mouvement Antiraciste Européen EGAM, Alain Daumas, Président de l’Union Française des Associations Tsiganes – UFAT, avec

Laurence Abeille (Députée du Val-de-Marne), Brigitte Allain (Députée de Dordogne), Fadela Amara (Ancienne Ministre de la Ville, Ancienne Présidente de Ni Putes Ni Soumises), Pouria Amirshahi (Député des Français de l’étranger – Maghreb/Afrique de l’Ouest), Sélim-Alexandre Arrad (Président des Jeunes Radicaux de Gauche), ASAV 92, Association Nationale des Gens du Voyage Catholique, Josiane Balasko (Réalisatrice , Actrice), Marius Bauer (Président de Latcho Drom), Antoine (Payou) Baptiste (Président de Gitans Languedoc-Roussillon), Patrick Baudouin (Président d’honneur de la FIDH), Antoine Becker (Président l’ANGV Rhône-Alpes), Jean Luc Benhamias (Député européen), Antoine Bernard (Directeur Général FIDH), Claudine Bouygues (Adjointe au Maire de Paris), Isabelle Brachet (Directrice des Opérations de la FIDH), Martial Brillant (Président de l’ANGVC Angers), Yago Briset (Président de Niglo Breizh), Isabelle Bruneau (Députée de l’Indre), Sarah Carmona (Présidente de Regards de Femmes Tsiganes), Roland Castro (Architecte), Laura Chatel (Sécrétaire Fédéral des Jeunes Ecologistes), Elie Chouraqui (réalisateur, producteur et scénariste), Bruce Clarke (Artiste plasticien), Collectif D’ailleurs nous sommes d’ici, Catherine Coquio (Professeur d’université – Paris 8), Sergio Coronado (Député des Français de l’étranger Amérique latine – Caraïbes), Christophe Cortez (Président des Gitans de Cavaillon), Christophe Cusol (Président de Le Niglo en Colère), Christophe Daumas (Président de Marriane Voyage), Jeanne Daumas (Présidente de Romnies), Maria de Franca (Directrice de la rédaction de La Règle du Jeu), Karima Delli (Députée européenne), Jean-Claude Dulieu (co-Président du MRAP), Isabelle Durant (Député européenne Vice-Présidente du Parlement Européen), Laurent El Ghozi (Président de la FNASAT, Membre de RomEurope), Miran Faipi (Président de l’Union Des Roms De L’Ex- Yougoslavie En Diaspora), Eric Fassin (Sociologue, Université Paris 8), Gianfranco Fattorini (co-Président du MRAP), Jacqueline Fraysse (Députée des Hauts-de-Seine), Mariano Garcia (Président de Casa d’Espagne), Joël Giraud (Député des Hautes-Alpes), Génériques pour la mémoire de l’immigration, André Glucksman , (Philosophe et essayiste), Charles Goerens (Député européen), Sihem Habchi (Chercheuse laboratoire Éthique,Santé et Politique, Paris V. Ex-Présidente Ni Putes Ni Soumises), Jonathan Hayoun (Président de l’UEJF Union des Etudiants Juifs de France), Père Arthur (Prêtre), Pierre Henry (Directeur Général de France Terre d’Asile), Bernadette Hétier (co-Président du MRAP), Marcel Hognon (Président du Mouvement des intellectuels Tziganes), Francine Jacob (Déléguée France du Forum européen des Roms et des Gens du voyage au Conseil de l’Europe et Présidente de Jamais Sans Nous), Nicole Kill-Nielsen ( Député Européenne), Karim Lahidji (Président de la FIDH), Tony Lariviere (Président de Français du Voyage), Yvan Le Bolloc’h (Musicien), Patrick Le Hyaric (Directeur du journal « L’Humanité » et député européen), Renée Le Mignot (co-Président du MRAP), Cindy Léoni (Présidente de SOS Racisme), MC Solaar (Musicien), Antoine Madelin (Directeur des activités auprès des OIG), Raïf Maljoku (Président de Romano Phralipé), Noël Mamère (Maire de Bègles, Député de Gironde), Dr Jacky Mamou (ancien Président de Médecins du monde, Président du Collectif Urgence Darfour), Fernand Maraval (Président de Alerte L’indien), Sandrine Mazetier , Députée de Paris – Vice Présidente de l’Assemblée nationale, Pierre Ménager (Président de Entre Aide Gens du Voyage), Radu Mihaileanu (Cinéaste), José Moréno (Président ADPG), MJCF (Mouvement Jeunes Communistes de France), Lucas Nédelec (Sécrétaire Fédéral des Jeunes Ecologistes), Néziri (Metzo) Nedzmmedin (Président du Centre Culturel Des Pays Centraux Et Orientaux – CCPCO) , Séta Papazian (Présidente du Collectif VAN – Vigilance Arménienne contre le Négationnisme), Thierry Patrac (Président de l’Association Cultures et Traditions des Gitans du Grand Sud et de Génération Musique), Cindy Pétrieux (Présidente de la Confédération Etudiante), Jean-Luc Poueyto (anthropologue, Université de Pau et des Pays de l’Adour), Jose Pubil (Président des Gitans de France), Monique Rabin (Députée de Loire Atlantique), Maximilien Raguet , Président de la FIDL, Vincent Ritz (Président de Regards), Baptiste Riot (Président de Malki Tsigani), Barbara Romagnan (Députée du Doubs), Yohan Salles (Président de Gitans de Tarascon), Marceau Sivieude (Directeur Afrique de la FIDH), Gino Soles (Président de l’Association Culturelle Catalane), Dominique Sopo (Ancien président de SOS Racisme, Membre du Conseil National du Parti Socialiste), Joseph Stimbach (Président Chave Foun WINTA), Pierre Tartakowsky (Président de la Ligue des droits de l’Homme), Yves Ternon (Historien), Ara Toranian (Co-président du Conseil de Coordination des organisations Arméniennes de France (CCAF) et directeur de publication du magazine Nouvelles d’Arménie), Marie-Christine Vergiat (Députée européenne) Giorgi Viccini (Président du Comité pour le Respect Des Droit Des Tsiganes), Sasha Zanko (Président de Tchatchipen).

Communiqués de la LDH

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