Intervention de Pierre Tartakowsky, Président de la LDH, au rassemblement de solidarité avec les artistes de Pussy Riot tenu à Paris, devant le Centre Pompidou à Beaubourg le 17 aout 2012.
Notre rassemblement aujourd’hui, en ce lieu hautement symbolique témoigne de notre colère, de notre volonté de lutte et de nos espoirs. Colère devant l’inadmissible ; lutte car nous qui sommes rassemblés ici entendons bien continuer, quel que soit le verdict, pour la défense des libertés, des droits en Russie ; espoir car là où il y a lutte, et singulièrement lutte collective, l’espoir est vivant. J’ajouterai que c’est aussi un rassemblement de vigilance.
Je ne veux pas revenir sur les faits eux-mêmes, sur ce que le pouvoir Russe reproche aux artistes de Pussy Riot ; le caractère absurde et odieux de l’accusation, la volonté d’intimidation, de faire peur, tout cela a déjà été dit et fort bien dit. Je veux simplement souligner trois éléments qui me semblent d’importance. Le premier c’est que se vérifie une fois de plus que la liberté d’expression et la liberté de création sont indissolublement liées et que dès qu’un pouvoir attaque l’une, il s’en prend à l’autre. Au pied de Beaubourg, cela doit être souligné : la lutte des artistes n’est pas séparable de celles qui se mènent pour les droits et les libertés des peuples.
La seconde c’est que ce procès pourrait bien être le procès de trop. L’ampleur des réactions dans le monde, les enjeux du féministe et de la jeunesse, tout ceci dessine une configuration un peu nouvelle en Russie et on peut penser que le pouvoir a en quelque sorte avec ce procès agressé une génération entière avec laquelle il avait passé, implicitement un « deal », sorte de pacte de non agression. La jeunesse, en Russie comme ailleurs, veut vivre libre et déteste voir censurée ses aspirations à vivre sa jeunesse, justement, au travers de ses choix culturels, singulièrement lorsqu’ils expriment ou rejoignent la volonté de dessiner de nouveaux modes d’être.
Vigilance, enfin, parce que le procès mené contre Pussy Riot correspond à ce que l’on appelle en France un délit de blasphème, délit fort heureusement proscrit en tant que tel. Nous savons pourtant que dans notre pays comme dans d’autres, des forces travaillent à réhabiliter cette notion, singulièrement en invoquant le respect des dogmes religieux. Les fondamentalismes de tous ordres suivent donc avec un œil gourmand ce procès de Moscou.
Notre mobilisation, si elle vise d’abord a soutenir les libertés en Russie n’est pas séparable des combats et mobilisations qui sont les nôtres en France. Ce sont pour ces combats et cette vigilance que nous entendons poursuivre la mobilisation.