Les étrangers et les étrangères exclus des concours de l’enseignement privé

Communiqué commun, dont la LDH

Des associations et des syndicats contestent devant le Conseil d’État une discrimination inacceptable

Quelques jours avant la rentrée, le gouvernement a adopté, contre l’avis de plusieurs syndicats d’enseignants, un texte qui exclut à l’avenir de l’accès aux concours de l’enseignement privé les étrangers et les étrangères ressortissantes de pays situés hors de l’Union européenne.



Jusqu’à présent, seules des conditions de diplôme – les mêmes que pour les concours de l’enseignement public – étaient exigées pour se présenter à ces concours. Avec le décret du 23 août 2013, les étrangers et les étrangères ne pourront plus prétendre au statut et à la stabilité offerts par la réussite aux concours : ils ne pourront plus enseigner que comme « maîtres délégués », c’est-à-dire dans la précarité et avec un salaire au rabais.

Cette réforme aura un impact très lourd et immédiat sur des personnes qui ont obtenu leurs diplômes en France ou sont encore en cours d’études et qui se trouvent subitement privées de cette voie d’accès à l’enseignement.

Elle représente par ailleurs une véritable régression : alors qu’on aurait attendu de ce gouvernement qu’il s’attache à restreindre la liste des emplois dits « fermés » aux personnes de nationalité étrangère, il a fait le choix, subrepticement et sous des prétextes fallacieux, d’inscrire dans les textes une nouvelle discrimination, allant ainsi à rebours de l’évolution observée depuis plus de deux décennies.

Désastreuse pour les personnes concernées, politiquement inacceptable, la mesure est de plus contraire aux principes du droit français et européen. Toute discrimination fondée sur la nationalité doit en effet être justifiée par des motifs légitimes. Or tel n’est pas le cas ici : le but est seulement de cantonner les étrangers et les étrangères dans une catégorie d’emplois inférieure à celle de leurs collègues qui auront pu se présenter aux concours.

Pour justifier cette mesure, on a prétendu que le système antérieurement en vigueur était contraire aux règles qui régissent les concours de la fonction publique ; mais les maîtres de l’enseignement privé, justement, ne sont pas des fonctionnaires ! Si l’objectif était de rapprocher les statuts des enseignants du privé et du public, cela ne devait pas se faire au prix d’une nouvelle discrimination. Une autre voie était possible pour un gouvernement soucieux d’égalité : ouvrir les concours de l’enseignement primaire et secondaire public aux étrangers comme le sont déjà les concours de l’enseignement supérieur, au lieu de maintenir des milliers de personnels étrangers qui remplissent les mêmes fonctions que leurs collègues français ou citoyens de l’Union européenne dans des emplois précaires et sous-payés.

Les organisations soussignées ont donc déposé devant le Conseil d’État un recours en annulation accompagné d’un référé-suspension contre le décret du 23 août 2013. Elles font valoir que la mesure porte atteinte au principe constitutionnel d’égalité et aux engagements internationaux de la France qui prohibent les discriminations fondées sur la nationalité dès lors qu’elles sont dépourvues de justification objective et raisonnable.

Le 22 octobre 2013

Organisations signataires :

- Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s),

- LDH (Ligue des droits de l’Homme),

- SNEIP-CGT (Syndicat national de l’enseignement initial privé)

- FERC-CGT (Fédération de l’éducation, de la recherche et de la culture)

- SUNDEP-Solidaires (Syndicat unitaire national démocratique des personnels de l’enseignement et de la formation privés) avec le soutien de l’Union syndicale Solidaires

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