Lettre à Jean Marc Ayrault, Premier ministre, au sujet de la politique de démantèlement des camps de Roms

Lettre du Collectif Romeurope



Monsieur le Premier ministre,

Le Collectif National Droit de l’Homme Romeurope tient à vous exprimer sa grande déception et sa totale incompréhension de la politique de démantèlement de campements menée actuellement par le Ministre de l’Intérieur, qui ne semble pas marquer de rupture avec celles conduites depuis plus de 10 ans par les gouvernements précédents, ce qui amène la Commission européenne à alerter à nouveau les autorités françaises.

Début août, à Lyon, à Paris, à Lille, à Marseille, des évacuations de lieux de vie se sont encore déroulées sans proposition d’accompagnement des personnes expulsées, en termes d’hébergement ou de relogement, et de prise en charge des familles avec enfants, les abandonnant à la rue dans une précarité encore plus grande. Des renvois par charters vers la Roumanie ont été organisés sous couvert de « retours humanitaires » alors qu’ils sont de fait encore effectués sous la contrainte, en l’absence de possibilité immédiate de relogement. En affirmant par voie de presse la nécessité de fermeté dans l’application de décisions de justice, le Ministre de l’Intérieur stigmatise à nouveau les populations roms. Et malgré l’annonce d’une concertation avec les associations pour trouver des solutions, il n’en a rien été sur le terrain lors de ces dernières opérations.

Comme il l’a déjà fait par son courrier du 28 juin dernier, le CNDH Romeurope vous demande l’arrêt immédiat de ces pratiques dont l’inefficacité est reconnue et qui contribuent à rendre plus difficile la recherche de solutions durables.
Ces initiatives ne sont pas conformes aux engagements du Président de la République qui s’est exprimé sur le sujet en faveur d’une politique plus respectueuse des droits de l’Homme et de la dignité. Devant ces situations complexes qui combinent des questions d’habitat insalubre, de précarité, de scolarité, d’accès aux soins, d’emploi,… nous renouvelons notre proposition que se tiennent au plus vite, à l’initiative des préfets, des réunions de travail avec tous les acteurs concernés, Communes, Conseils généraux, Conseils régionaux et associations impliquées auprès de ces familles afin d’examiner chaque situation individuelle et de trouver des solutions pérennes, s’inscrivant dans le droit commun.

Des solutions sont possibles, elles n’attendent que le soutien de l’Etat. C’est particulièrement le cas avec la levée des mesures transitoires qui limitent l’accès au marché du travail français des ressortissants roumains et bulgares et qui sont un véritable frein à l’insertion de ces citoyens européens.

La problématique de ces familles roms dépasse le cadre du seul ministère de l’Intérieur, elle relève d’abord de la question du logement des personnes précaires et sans ressources, mais aussi de celles des affaires sociales, de l’Education nationale et de l’emploi, c’est pourquoi le CNDH Romeurope réaffirme le besoin d’une concertation interministérielle, sous votre autorité, permettant un pilotage et une plus grande cohérence des politiques publiques respectueuses à l’égard de ces ressortissants européens.

Afin de vous présenter plus en détail nos propositions, nous sollicitons un entretien dans les meilleurs délais.

Face à cette actualité préoccupante, vous comprendrez que nous rendions publique notre démarche auprès de vous.

Dans l’attente, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre très haute considération.

Pour le CNDH Romeurope,
Malik Salemkour, vice-président de la Ligue des droits de l’Homme.

Paris, le 14 août 2012.

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