Tribune collective dont la LDH est signataire
Un an après le naufrage ayant entraîné la mort par noyade de trente et un migrants, dont des enfants, soixante-cinq associations humanitaires françaises, britanniques et belges travaillant sur les questions migratoires pointent, dans une tribune au « Monde », des manquements inacceptables de la part des secours français et anglais.
Le 24 novembre 2021, vers 14 heures, un navire de pêche aperçoit des dizaines de corps flottant dans les eaux glacées de la Manche. Un à un, les corps sont repêchés sans vie. Au moins vingt-sept personnes sont mortes noyées, quatre sont toujours portées disparues et deux ont survécu. Il y a un an survenait ainsi l’accident le plus meurtrier à la frontière franco-britannique depuis que les corps sans vie de trente-neuf personnes exilées vietnamiennes avaient été retrouvés dans un camion en 2019.
Kazhal, Hadiya, Maryam et tous les autres avaient quitté les côtes françaises sur une embarcation pneumatique la veille autour de 22 heures. Fuyant les conflits et la misère, toutes et tous avaient l’espoir d’atteindre l’Angleterre sains et saufs. Certains pour y retrouver leur famille, leur fiancé, d’autres pour fuir les conditions d’accueil en Europe, et beaucoup espéraient y travailler afin de soutenir leur famille restée au pays. Face à l’impossibilité d’une traversée sûre, Mhabad, Rezhwan, Mohammed et les autres se sont tournés vers les réseaux de passage.
Aux alentours de 2 heures du matin, dans la nuit noire, l’embarcation commence à prendre l’eau. Les enregistrements des appels aux secours français, révélés par Le Monde le 13 novembre, font froid dans le dos. Ils prouvent que de nombreux appels de détresse ont été reçus par les services de secours français et traités avec mépris. Des appels ont aussi été passés aux secours britanniques. Ces appels n’ont pas conduit au sauvetage de cette embarcation, ni de la part des Français ni de celle des Britanniques. Ils sont morts noyés dans une eau glacée. « On s’est tous tenu les mains jusqu’au bout », raconte Mohammed, rescapé.
Violence, soif, faim
Pshtiwan, Shakar, Fikiru et les autres venaient d’Afghanistan, d’Erythrée, d’Ethiopie, d’Irak, d’Iran, d’Egypte, de Somalie ou du Vietnam. Ces personnes avaient traversé des montagnes, des déserts, des mers, enduré la violence, la soif et la faim, elles avaient parcouru entre 3 000 et 10 000 kilomètres pendant des mois ou des années pour arriver là, sur le littoral français, sous une tente, à 33 kilomètres de leur objectif. Twana, Mubin et les autres avaient entre 6 et 59 ans, et avaient quitté leurs parents, leurs sœurs, leurs frères et leurs amis pour en arriver là.
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