Les contentieux LDH en lien avec la lutte contre le Covid-19

Dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire (EUS), de nombreux maires outrepassent leurs domaines de compétences, et parfois la loi, pour prendre des mesures supplémentaires sur leurs territoires – sous forme d’arrêtés – par rapport à ce que le gouvernement applique déjà à l’ensemble du pays.

Il est indispensable que les efforts pour lutter contre le Covid-19 ne soient pas déstabilisés par des initiatives locales intempestives, lesquelles peuvent être aussi dangereuses pour la santé publique, illégales et attentatoires aux libertés fondamentales de chacune et de chacun, et parfois même discriminatoires lorsqu’appliquées sur certains territoires dans le but de viser une population précise.

Il n’y a qu’un pas entre crise sanitaire et crise démocratique. La Ligue des droits de l’Homme (LDH) continuera à exercer une veille attentive face à des éventuelles décisions municipales qui portent atteinte aux droits et libertés et rappelle que l’Etat de droit implique que les maires respectent d’eux-mêmes la loi.

 

Dossiers clos

La LDH rappelle que si le port d’un masque est une mesure utile, imposer le port du masque sous peine d’amende, sur une seule commune, de manière isolée et concurrentielle sans en avoir pour toutes et tous, et en premier lieu les soignants, n’est pas la solution.

Le Conseil d’Etat définit très strictement le pouvoir de police des maires dans le cadre de l’EUS et donne raison à la LDH : le maire de Sceaux avait décidé de faire appel de l’ordonnance rendue par le tribunal administratif ayant sur recours introduit par la LDH suspendu son arrêté obligeant au port du masque. Par une ordonnance rendue le 17 avril, le Conseil a décidé d’encadrer très strictement le pouvoir de police des maires sous l’état d’urgence en retenant que si le code général des collectivités territoriales, autorise le maire, y compris en période d’état d’urgence sanitaire, à prendre les mesures de police générale, en revanche, la police spéciale instituée par le législateur fait obstacle, pendant la période où elle trouve à s’appliquer, à ce que le maire prenne au titre de son pouvoir de police générale des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire, à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l’édiction indispensable et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l’efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l’Etat.”

Sanary-sur-Mer : Par arrêté en date du 26 mars, le maire de Sanary-sur-Mer a décidé d’interdire les sorties à plus de dix mètres du domicile. La LDH a introduit un référé-liberté contre cette décision devant le tribunal administratif de Toulon. Le maire a retiré son arrêté avant l’audience. Le tribunal administratif a donc prononcé un non-lieu à statuer le 1er avril tout en condamnant la commune au paiement des frais et dépens.

Préfet des Vosges : Par un arrêté en date du 8 avril 2020, le préfet des Vosges a interdit les rassemblements statiques dans le cadre des déplacements dérogatoires autorisés par l’article 3 du décret du 23 mars 2020, à l’exception des files d’attente pour effectuer des achats de première nécessité dans les établissements dont les activités demeurent autorisées et sur le réseau des transports en commun. La LDH a demandé au préfet de modifier son arrêté devant le risque de verbalisations arbitraires susceptibles d’être prises sur le fondement de son arrêté. En l’absence de réponse, la LDH a introduit un référé-liberté devant le tribunal administratif de Nancy. Par une ordonnance du 21 avril, le tribunal administratif a fait droit à la requête en suspendant l’arrêté contesté.

Bandol : par arrêté du 21 mars, le maire de Bandol a décidé d’instaurer un couvre feu et d’interdire les déplacements au delà de 300 mètres de son domicile. La LDH a introduit un référé-liberté contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Toulon. Face à cette menace contentieuse, le maire de Bandol a décidé de retirer son arrêté.

Nice : arrêté municipal couvre pour certains quartiers populaires : le maire de Nice a, par arrêté en date du 15 avril, reconduit son arrêté du 7 avril par lequel il entend imposer un couvre-feu dans certains quartiers de la ville de Nice. La LDH a décidé d’introduire un référé-liberté devant le tribunal administratif, lequel a, par une ordonnance en date du 23 avril rejeté la requête.

Saint-Mandrier-sur-Mer : par arrêté du 16 avril, le maire de St-Mandrier-sur-Mer a prononcé diverses mesures : interdictions d’accès aux aires publiques, fermeture des commerces de 21h à 5h, interdiction des déplacements au-delà de 200 mètres, obligation d’achats dans les commerces locaux et supermarchés de la Seynes-sur-mer. La LDH a décidé d’introduire un référé-liberté contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Toulon. Par une ordonnance du 23 avril, le tribunal administratif a décidé de faire droit à la requête introduite par la LDH et a décidé de suspendre l’arrêté contesté.

Val d’Isère : Par arrêté du 8 avril, le maire de Val d’Isère a décidé de rendre obligatoire le port du masque pour toute sortie. La LDH a décidé d’introduire un référé-liberté devant le tribunal administratif de Grenoble. Le Maire a toutefois avant l’audience retiré son arrêté. Le tribunal n’a pu dès lors que prononcer un non-lieu à statuer le 16 avril tout en condamnant la commune au paiement des frais et dépens.

Vic-en-Bigorre : Par un arrêté en date du 7 avril, le maire de Vic-en-Bigorre a décidé d’imposer à sa population le port du masque pour tout déplacement. La LDH a introduit un référé-liberté contre cette décision devant le tribunal administratif de Pau qui par ordonnance du 17 avril a suspendu la décision contestée.

 

Dossiers en cours

Obstacles à l’enregistrement et à la prise en charge des demandeurs d’asile en Ile-de-France : la LDH, accompagnée de six autres associations (Acat – Ardhis – GAS – Gisti – Kali – Utopia 56) et de requérants individuels, a décidé d’introduire un référé-liberté devant le tribunal administratif de Paris visant à l’adoption en urgence de mesures permettant de mettre un terme aux obstacles dressés au droit d’asile et notamment d’enjoindre au directeur général de l’office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), aux préfets de police de Paris, de la région Ile-de-France, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, de l’Essonne, du Val d’Oise, des Yvelines et des Hauts-de-Seine d’enregistrer les demandes d’asile des requérants individuels dans un délai de 3 jours, et plus globalement d’ordonner à ces mêmes autorité de mettre un terme à l’atteinte grave et manifestement illégale au droit d’asile, en adoptant toute mesure de nature à faire cesser cette atteinte tout en garantissant la sécurité des personnes, dans un délai de 2 jours.

Par une ordonnance du 21 avril le tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande des associations en enjoignant :

– aux préfets de rétablir dans un délai de cinq jours « et jusque’ à la fin de l’état d’urgence sanitaire, le dispositif d’enregistrement des demandes d’asile supprimé au mois de mars, de façon adaptée au flux de la demande et à cette fin de procéder à la réouverture, dans les conditions sanitaires imposées par le covid-19, d’un nombre de GUDA permettant de traiter ce flux. » ;

– à l’Ofii de procéder sans délai à la réouverture de ladite plateforme en corrélant là aussi les moyens déployés au flux de la demande et à la capacité d’accueil des GUDA qui seront rouverts. ».

Le ministère de l’Intérieur et l’Ofii ont décidé de faire appel devant le Conseil d’Etat. L’audience est fixée le 28 avril.

Cholet : arrêté municipal couvre-feu du 14 avril interdisant les déplacements entre 21h et 5h : la LDH a introduit un référé-liberté devant le tribunal administratif de Nantes. Par une ordonnance du 24 avril, le tribunal administratif a fait droit à la requête introduite par la LDH et a suspendu l’arrêté contesté. Le Maire de Cholet a repris un nouvel arrêté immédiatement contesté devant le tribunal administratif par la LDH.

Le Plessis Robinson : par arrêté du 26 mars, le maire du Plessis-Robinson a décidé d’un couvre-feu de 22h à 5h à durée indéterminée ainsi que de la fermeture des commerces alimentaires à 21h30. La LDH a introduit un référé liberté devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Saint-Etienne : par arrêté du 15 avril, le maire de St-Etienne a interdit la pratique de l’activité physique extérieure de 9h à 21h. La LDH a introduit un référé liberté devant le tribunal administratif de Lyon. Par décision en date du 24 avril, le tribunal administratif a rejeté par ordonnance de tri, sans audience ni débat contradictoire, le référé-liberté introduit par la LDH qui a décidé de faire appel devant le Conseil d’Etat.

Mions : par arrêté du 16 avril, le maire de Nions a renouvelé son arrêté prononçant un couvre-feu de 22h à 5h jusqu’au 11 mai. La LDH a introduit un référé liberté devant le tribunal administratif de Lyon. Par décision en date du 24 avril, le tribunal administratif a rejeté par ordonnance de tri, sans audience ni débat contradictoire, le référé-liberté introduit par la LDH qui a décidé de faire appel devant le Conseil d’Etat.

Contamines-Montjoie : par arrêté du 7 avril, le maire de Contamines-Montjoie a décidé d’interdire aux établissements d’hébergement de recevoir du public. La LDH a introduit un référé-liberté contre cet arrêté devant le tribunal administratif de Grenoble.

Grand-Couronne : par arrêté en date du 24 mars, le maire de Grand-Couronne a décidé d’un couvre-feu entre 22h et 5h. La LDH a introduit contre cette décision un référé-liberté devant le tribunal administratif de Rouen.

Forges-les-Eaux : le maire de Forges-les-Eaux a décidé d’instaurer, le 23 mars 2020, un couvre-feu entre 21h et 6h. La LDH a introduit contre cette décision un référé-liberté devant le tribunal administratif de Rouen.

Communiqués de la LDH

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