Alep vivra

ALEP VIVRA

Plus de 150 personnalités du monde de la culture ont rejoint les premiers signataires de la lettre ouverte à François Hollande: « Alep vivra », parue dans Libération, le 22 février 2016. Leurs noms résonneront sur la place de l’Hôtel de Ville de Paris, samedi 12 mars à 18h30, à l’occasion du rassemblement qui marquera le cinquième anniversaire des manifestations pour la liberté et la démocratie en Syrie.

* Voir Libération, 22 février 2016 :

– La trêve intervenue en Syrie le 27 février 2016, suite aux accords russo-américains du 21 février, reste partielle et précaire. Plusieurs violations sont à déplorer, dues pour une large part aux forces gouvernementales soutenues par l’aviation russe qui se sont pourtant engagées à la respecter. Adoptée le jour même à l’unanimité, la résolution 2268 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui entérine ce cessez-le-feu, exige l’application « sans délai » de sa précédente résolution 2254 (18 décembre 2015), afin de favoriser une transition politique dans le pays. Ses conditions sont encore loin d’être respectées, notamment la « libération rapide de toute personne arbitrairement détenue » et l’accès « rapide, sûr et sans entrave » des secours humanitaires à l’ensemble de la population, « tout particulièrement dans les secteurs assiégés ».

– Le 20 février, le président de la République a accordé à cinq signataires de l’appel « Alep vivra » un entretien au cours duquel il assurait partager leurs inquiétudes et vouloir mettre en œuvre tout ce qui dépendra de la France pour mettre fin aux souffrances des civils.

– Cette lettre ouverte à François Hollande a depuis lors reçu le soutien de 150 personnalités qui pressent les autorités françaises et européennes de faire preuve de vigilance et de détermination pour la pleine application de ces résolutions.

– Nous vous invitons à signer et partager le plus largement possible cet appel.

– L’Appel d’Avignon à la solidarité avec le peuple syrien, à l’origine de cette initiative, s’associe au rassemblement qui marquera le cinquième anniversaire des manifestations pour la liberté et la démocratie en Syrie, le samedi 12 mars à Paris (à 17h à la Fontaine des Innocents et à 18h30 sur le parvis de l’Hôtel de Ville).

Alep vivra.

Lettre ouverte à François Hollande sur la Syrie

parue dans Libération (« Idées »), lundi 22 février 2016, p. 18.

(www.liberation.fr/planete/2016/02/21/alep-vivra-lettre-ouverte-a-francois-hollande-sur-la-syrie_1434911)

M. le Président de la République,

Nos générations ont accédé aux responsabilités sous le serment de ne plus laisser commettre dans l’impunité des crimes contre l’humanité. Pourtant, après Srebrenica 1995, Grozny 2000, Alep 2016 s’annonce comme un nouveau reniement. Devant les massacres en cours en Syrie et les terribles scènes qui se déroulent dans le nord du pays, nul ne pourra dire : « nous ne savions pas ». Voici cinq ans que nous sommes les témoins de la guerre menée par un dictateur contre son propre peuple, dont les décomptes macabres dépassent les 260 000 morts, un nombre considérable de blessés et de mutilés, ainsi que des millions de réfugiés et de déplacés.

Chaque jour voit s’accumuler de nouvelles preuves des bombardements aveugles sur les habitations, les écoles et les hôpitaux, des blocus implacables, des arrestations arbitraires, des tortures de masse, de l’extermination des prisonniers et autres pratiques que le régime de Bachar Al-Assad a érigées en politique d’État. Leur qualification de crimes contre l’humanité est si patente que Moscou et Pékin ont accepté d’y faire référence dans les résolutions 2254 et 2258 du Conseil de sécurité de l’ONU votées en décembre dernier, mais aussitôt bafouées par la Russie qui a déployé tout le cynisme de sa diplomatie pour couvrir les assassins et toute la puissance de son aviation pour écraser leurs opposants. Au supplice des populations civiles s’ajoute donc l’humiliation des institutions internationales.

Face à cet assaut de barbarie la France proteste par votre voix, mais l’Europe est absente, l’OTAN muette et la coalition internationale contre Daesh détourne le regard comme s’il s’agissait d’un problème secondaire. Après avoir torpillé les négociations de Genève en encourageant Al-Assad à refuser tout préalable d’ordre humanitaire, Moscou prétend maintenant avoir un plan pour imposer un cessez-le-feu, auquel le Département d’État américain a fait mine de croire à Münich, au risque d’être aussitôt démenti par les faits. En réalité ce projet est assorti de conditions qui en rendent l’application hautement improbable. La Russie est en train de commettre l’irréparable et tout porte à penser qu’il s’agit d’une nième manœuvre pour leurrer les occidentaux le temps que ses armes tranchent le sort de la bataille. Si Vladimir Poutine veut faire croire à un désir de paix, si ténu soit-il, et faire avancer une solution politique, si fragile soit-elle, il lui suffit d’ordonner l’arrêt immédiat des bombardements et de contraindre son protégé à la retenue. Recep Erdogan, qui a pris part à l’escalade en bombardant les combattants kurdes, doit aussi faire taire ses canons.

De nombreuses villes de Syrie sont aujourd’hui encerclées, mais le siège d’Alep promet des souffrances et des massacres qui excéderont en ampleur les tueries déjà déplorées à Homs ou Dera. S’agit-il d’un mal inévitable, de sacrifices nécessaires pour combattre le terrorisme ? Bien au contraire, la stratégie arrêtée entre Moscou, Damas et Téhéran vise en priorité les rebelles de l’Armée syrienne libre et leurs associés, les administrations locales qu’ils avaient pu mettre en place dans les zones sous leur contrôle et les civils qui parvenaient tant bien que mal à y goûter les rares fruits d’une précaire liberté. Les frappes russes, l’offensive du régime, les attaques du Hezbollah et des milices irakiennes soutenues par l’Iran ne visent Daech que de manière très marginale, car ceux qui les mènent ont besoin de cet épouvantail pour déguiser la dictature en recours. Elles favorisent outrageusement le Front Al-Nosrah, la filiale régionale d’Al-Qaida qui prend désormais l’avantage sur le terrain. Pire encore, elles assurent aux djihadistes de toutes obédiences la victoire dans les esprits, tant il leur est aisé de dénoncer la complaisance des nations démocratiques envers l’homme fort du Kremlin et le despote de Damas comme une preuve de mépris vis-à-vis des musulmans sunnites.

Le président Obama veut espérer que les États-Unis ne subiront pas sur leur sol les conséquences fâcheuses de leur stratégie de désengagement, mais depuis le 13 novembre nous savons que notre pays y est exposé dans sa chair. Si notre discernement était affaibli au point de nous cantonner dans l’attentisme, notre intérêt vital ne nous commanderait pas moins d’agir. Il est clair en effet que les désespérés qui fuient les environs d’Alep aujourd’hui par dizaines – demain par centaines – de milliers ne se contenteront pas de grossir les rangs des réfugiés qui se pressent aux portes de l’Europe. Plutôt que périr sous les bombes ou dépérir dans les camps, beaucoup préféreront troquer l’espoir contre la haine, et retourner celle-ci vers les spectateurs passifs de leur ruine.

L’histoire a donné à la France des responsabilités particulières vis-à-vis de la Syrie. L’avenir commande à l’Europe de s’en soucier sans tarder davantage. Les experts qui de tous côté pressent nos gouvernements de ne rien faire, au nom d’un réalisme sans mémoire ou d’une complexité sans lumière, évacuent une fois de plus le sort des populations dont les cris ne résonnent guère dans les enceintes feutrées où se négocie leur survie. Il est temps que la France entraine ses voisins européens, ceux du moins qui se disent encore attachés à la maison commune, dans des initiatives propres à faire vraiment cesser le feu.

La saisine du Conseil de sécurité et, à travers celui-ci, de la Cour pénale internationale, relève de l’urgence. L’ouverture de la frontière turque et la création d’une large zone d’exclusion aérienne partout où les civils sont en péril doivent être mises à l’ordre du jour dans les discussions avec Ankara. Il faut imposer sans condition la levée de tous les sièges et la liberté de circulation pour les convois humanitaires requises dans les résolutions de l’ONU, et organiser sans délai des largages de vivres et médicaments sur les quartiers affamés. Il convient enfin d’associer aux consultations le Haut Comité des négociations représentant l’opposition au régime, sans laquelle le peuple syrien n’aurait pas voix au chapitre. Car qui d’autre hormis ces hommes et ces femmes pourrait regagner le terrain conquis par Daech et ensemencer les terres brûlées par les Al-Assad. Et qui d’autre que leurs enfants saurait dans un futur proche construire une Syrie libre et pacifique ?

Mais rien de cela ne sera possible si nous abandonnons aux meurtriers les centaines de milliers de personnes qui subsistent dans ce carrefour des cultures et des religions qu’est la grande cité du nord depuis plus de 4 000 ans. Alep vivra.

SIGNEZ

 

– Premiers signataires :

Jack Lang, ancien ministre, président de l’Institut du monde arabe

Jack Ralite, ancien ministre

Anne Alvaro, comédienne

Dominique Blanc, comédienne,

Marcel Bozonnet, comédien et metteur en scène,

Arnaud Desplechin, réalisateur,

Maguy Marin, chorégraphe

Ariane Mnouchkine, metteuse en scène, directrice du Théâtre du Soleil,

Michel Piccoli, comédien,

Denis Podalydès, comédien, sociétaire de la Comédie-Française,

Emmanuel Wallon, professeur de sociologie politique
– Avec le soutien de :

Gabriel Aghion, cinéaste

Agnès B, styliste

Darina Al Joundi, comédienne

Isabelle Alonso, écrivain

Pierre Arditi, comédien

Yann Arthus-Bertrand, photographe et cinéaste

Pascal Aubier, cinéaste

Tahar Ben Jelloun, écrivain

Jean Benguigui, comédien

Luc Beraud, cinéaste

Charles Berling, comédien, metteur en scène

Jacques. A Bertrand, écrivain

Julie Bertuccelli, cinéaste et présidente de la SCAM

Didier Bezace, comédien metteur en scène

Jean Bois, auteur, comédien et metteur en scène

Christian Boltanski, plasticien

Carole Bouquet, comédienne

Jérôme Bourdon, professeur  d’université

Edith Bouvier, journaliste

Myriam Boyer, comédienne

Geneviève Brisac, écrivain, éditeur

Charlie Bruneau

Dominique Cabrera, cinéaste

Michel Cantal-Dupart, architecte

Jean-Claude Casadesus, chef d’orchestre

Caroline Casadesus,  cantatrice

Philippe Caubère, comédien

Marie-Claude Char, éditrice

Mehdi Charef, cinéaste

Noëlle Châtelet, écrivain

Elie Chouraqui,  producteur, cinéaste et scénariste

Gérard Cicurel, vice-président directeur de Ella Factory

Catherine Clement, écrivain

Jean-Paul Cluzel, ancien directeur RMN

Daniel Cohn-Bendit, ancien député européen

Jean-Louis Comolli, scénariste, cinéaste et écrivain

Frédéric Compain, cinéaste

Dominique Constantin, comédienne

Pascal Convert, plasticien

Alain Cornec, avocat

Catherine Corsini, cinéaste

Florence Darel, comédienne

Emmanuelle De Boysson, romancière, critique littéraire

Stéphane De Groodt,  comédien

Bertrand De Labbey, directeur de l’agence VMA

Louis-Do De Lencquesaing, acteur et réalisateur

Elizabeth  De Portzamparc, architecte-urbaniste

Didier Decoin, écrivain

Robert Delpire, éditeur

Mylène Demongeot, comédienne

Philippe Djian, écrivain

Catherine Dolto, médecin

Marie Dompnier, comédienne, chanteuse, metteur en scène

Virginie Dörr, directrice de l’agence Juillet 91

Anny Duperey, comédienne écrivain

Danièle Evenou, comédienne

Bernard Faivre-d’Arcier, président des Biennales de Lyon et de l’EPCC Metz-en-Scènes

Claude Fischer, directrice des Entretiens Européens Eurafricains

Elsa Flageul, écrivain

Irène Frain, écrivain

Dan Franck, écrivain scénariste

Gérard Fromanger, peintre

Dominique Frot, comédienne

Jacques Gaillot, évêque

Jacques Gamblin, comédien

Nicole Garcia, comédienne et cinéaste

Marie Gillain, comédienne

Caroline Glorion, réalisatrice et directrice de programme

Jean-Paul Goude, styliste, plasticien

Romain Goupil, réalisateur

Sophie Goupil, productrice

Nicolas Guilbert, photographe et plasticien

Henri Helman, cinéaste

Philippe Herzog, économiste, président d’honneur de Confrontations Europe

Serge Hureau, metteur en scène, directeur du Hall de la chanson

Jean-Pierre Igoux, scénariste et réalisateur

Agnès Jaoui, comédienne, scénariste et cinéaste

Alain Jaubert, cinéaste, écrivain

Marthe Keller, comédienne

Noémie Kocher, comédienne

Serge Lalou, producteur

Bernard Lavilliers, auteur compositeur interprète

Gabriel Le Bomin,  cinéaste

Patrice Leconte, cinéaste

Laurent Lévy, réalisateur

Lorraine Levy, dramaturge, scénariste et réalisatrice

Philippe Lioret, réalisateur, scénariste et producteur

Jonathan Littell, écrivain

Jean-Louis Livi, producteur

Manon Loizeau, réalisatrice

Murielle Magellan, écrivain et scénariste

Macha Makeieff, comédienne, metteur en scène, directrice de théâtre

Christophe Malavoy, comédien et cinéaste

Tonie Marshall, cinéaste

François Marthouret, comédien et cinéaste

Jean-Michel Meurice, réalisateur et plasticien

Betty Miallet, éditrice

Serge Moati,  producteur réalisateur

Catherine Modolo, directrice artistique

Claude Mollard, photographe, écrivain et expert culturel

Sarah Moon, photographe

Suzie Morgenstern, écrivain

Michel Morzière, président d’honneur de l’association Revivre

Gérard Moulevrier, directeur de casting

Véronique Nahoum-Grappe, anthropologue

Jean-Luc Nancy, philosophe

Marie-José Nat, comédienne

Stanislas Nordey, metteur en scène

Maurice Nussenbaum, professeur de finance

Françoise Nyssen, présidente d’Actes Sud

Pascal Ory, historien

Alfred Pacquement, conservateur du patrimoine

Caroline Pacquement, responsable de relations publiques

Dominique Paini, théoricien, écrivain

Michelle Perrot, historienne

Florent Peyre, humoriste

Alice Pol, comédienne

Bruno Rafaelli, comédien

Christiana Reali, comédienne

Philippe Rebbot, acteur et scénariste

Luis Rego, comédien

Robin Renucci, comédien

Serge Rezvani, écrivain, artiste peintre

Georges Rosenfeld, retraité

Christophe Ruggia, cinéaste

Hugo Santiago, cinéaste

Pierre Santini, comédien et metteur en scène

Daniel Schick, journaliste et réalisateur

Valérie Schlumberger, comédienne

Colombe Schnek, journaliste,  écrivain et réalisatrice

Arnaud Selignac,  cinéaste

Fabienne Servan-Schreiber, productrice et réalisatrice

Léa Seydoux, comédienne

Caroline Silhol, comédienne

Charlotte Silvera, scénariste et réalisatrice

Claire Simon, cinéaste

Jean-Pierre Sinapi, cinéaste

Bruno Solo, comédien

Béatrice Soulé, réalisatrice et productrice

Ousmane Sow, sculpteur

Alexandra Stewart, comédienne

Laurent  Stocker, sociétaire de la comédie française

Florence Strauss, réalisatrice

François Tanguy, metteur en scène

Bertrand Tavernier, cinéaste

Danièle Thompson, scénariste et cinéaste

Corinne Touzet, comédienne, productrice

Marie-Laure Viebel, plasticienne

Daniel Vigne, cinéaste

Jean-Pierre Vincent, metteur en scène

Martine Voyeux, photographe

Virginie Wagon, cinéaste

Olivier Weber, écrivain, journaliste, réalisateur

Mâkhi Xenakis, plasticienne

Valérie Zenatti, écrivain

Françoise Zonabend, ethnologue et anthropologue

 

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