Parce que les portes d’un service public moderne ne sauraient être fermées au public, l’assignation en justice des préfectures imposant illégalement l’usage d’Internet, sans alternative possible pour déposer une demande de titre de séjour, se poursuit. Dix-sept nouvelles préfectures seront visées par des recours déposés dès le 30 juin, en métropole et dans les outre-mer, et le même jour en Ile-de-France des dizaines de personnes étrangères saisiront en leur nom les juridictions pour obtenir un rendez-vous.
L’offensive contentieuse contre la fermeture des guichets et l’imposition de la dématérialisation des démarches d’accès à un titre de séjour se poursuit : dix-sept préfectures, en métropole et dans les outre-mer, sont aujourd’hui assignées en justice par la LDH, la Cimade, le Groupe d’information et de soutien des immigré-e-s, le Syndicats des avocats de France, le Secours catholique et le Conseil national des Barreaux pour avoir choisi d’imposer l’usage du numérique pour déposer une demande de titre de séjour. Il est demandé aux tribunaux administratifs d’enjoindre aux préfectures concernées la mise en place d’une voie non dématérialisée d’accès aux droits, comme le prévoit la loi. Ces dix-sept requêtes viennent s’ajouter aux six autres déposées depuis le début de l’année 2021 et encore pendantes devant les juridictions.
En parallèle, les personnes étrangères vont une nouvelle fois saisir de manière massive les juridictions administratives, comme elles le font depuis plusieurs mois, afin d’obtenir un rendez-vous en préfecture pour déposer leurs demandes, en Ile-de-France soutenues par le collectif « bouge la préfecture » et dans d’autres départements (Finistère, Guadeloupe…). Sur six tribunaux administratifs, contre 139 requêtes déposées en 2018, 1149 étaient déposées sur les seuls quatre premiers mois de l’année 2021, témoignant de l’ampleur des difficultés sur le terrain.
La dématérialisation des démarches administratives pourrait représenter une opportunité forte de simplification et d’amélioration de l’accès au service public, en évitant déplacements et attente. Elle devrait théoriquement permettre aux administrations de dégager les moyens ainsi libérés pour mieux recevoir les personnes si nécessaire. Pourtant, dans les services étrangers des préfectures, le numérique est aujourd’hui un mur qui interdit aux usagers et usagères l’accès au guichet, souvent indispensable pour les demandes de titre de séjour, et qui les prive de toute possibilité d’échange avec un interlocuteur.
Rendez-vous à prendre en ligne sans plages disponibles, mails de réponse automatique sans qu’aucune suite n’y soit donnée, silence prolongé après le remplissage en ligne d’un formulaire complexe : le manque de moyens alloués aux services étrangers des préfectures est un alibi commode pour justifier ces dysfonctionnements et camoufler une politique consciemment organisée pour restreindre l’accès au séjour.
L’impact de ces procédures numériques varie selon le statut des personnes concernées et la dématérialisation apparaît comme un outil de tri des personnes accédant à un titre de séjour en amont de l’examen de leur dossier. Les personnes sans-papiers sont les plus massivement touchées, maintenues derrière un écran d’ordinateur à distance de la procédure de régularisation pendant parfois plus d’une année.
La fermeture des guichets fabrique des sans-papiers : des milliers de personnes perdent le bénéfice d’un titre de séjour du fait de l’incapacité du service public à respecter ses obligations légales. La crise sanitaire ne saurait excuser les dysfonctionnements du service public, à l’heure où les populations précaires sont plus fragilisées que jamais.
Nos organisations entendent alerter sur la saturation des services étrangers des préfectures et demandent un service public ouvert à ses administrées et administrés, qui garantissent un égal accès aux droits pour tous et toutes