Censurer les arts de la rue : un mauvais coup porté au vivre ensemble

Communiqué de l’Observatoire de la liberté de création

Alors que l’état d’urgence a été prolongé une quatrième fois cet été, les manifestations d’arts de la rue font face à des exigences de sécurisation de plus en plus contraignantes. Malmenés, déplacés, redimensionnés, voire annulés, les spectacles dans l’espace public portent pourtant la capacité à ré-enchanter l’espace public aujourd’hui.

Depuis l’automne dernier, des actes terroristes ont frappé plusieurs fois dans l’espace public.

La gravité de cette situation historique conduit à une sur-sécurisation et à une forme de privatisation sécuritaire de l’espace public, contraire à sa nature de bien public et d’espace de partage par excellence entre les citoyens et les citoyennes.

Dans ce contexte, les propositions artistiques dans l’espace public répondent par son ré-enchantement. Il faut reconnaître le savoir-faire des artistes des arts de la rue, spécialistes de l’intervention dans l’espace public. Leurs gestes poétiques participent à un mouvement du sensible, du festif, du fraternel et du pacifique.

Malgré l’envie et les batailles menées par des organisateurs convaincus pour trouver des solutions, les spectacles d’arts de la rue font face depuis plusieurs mois à des annulations en cascade, sans concertation avec les compagnies concernées. Cela accroit la fragilisation d’un secteur, de ses emplois et de ses structures économiques.

Cette multiplication des annulations s’appuie sur des motifs d’impossible sécurisation des espaces publics par manque d’effectifs suffisants de forces de police. Cela participe à une régression inacceptable des libertés d’expression et de création dans l’espace public.

A Chalon dans la rue, la compagnie Les Batteurs de Pavé s’est vue signifier l’annulation de son spectacle Les Trois Mousquetaires. Au festival FARse 2016 à Strasbourg, c’est le spectacle Funambus de la compagnie Underclouds qui a été annulé. La compagnie Transe Express connaît l’annulation d’une représentation prévue à l’occasion de l’America’s cup à Toulon en septembre.

Il importe de réaffirmer la responsabilité partagée entre les professionnels (artistes, organisateurs), les élu.e.s, les représentants de l’Etat et les citoyens-spectateurs : l’espace public appartient à tous et il appartient à tous d’assumer les conditions des manifestations artistiques dans l’espace public. La prudence est certes de mise, mais elle va de pair avec le courage de s’émerveiller ensemble et celui de ne pas céder à ceux qui veulent propager la peur.

La présence vive de tous les arts dans l’espace public est une réponse riche aux inquiétudes qui pèsent sur notre société. Rester dans les rues pour y vivre les arts vivants est la seule réponse à l’instrumentalisation manichéenne de la peur. Il faut continuer d’affirmer nos valeurs : libertés d’expression, de création et de circulation dans l’espace public.

En France et partout ailleurs, l’art est public : il doit continuer à s’épanouir en rue libre.

Paris le 16 août 2016

Communiqués de la LDH

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