Communiqué commun dont la LDH est signataire
Le 21 novembre 2016, Tous migrants lançait sa première alerte face à la dérive de l’Etat, en dénonçant les multiples atteintes aux droits des personnes exilées, en Méditerranée, à Calais, à Paris, dans la vallée de la Roya, à Menton, et dans les Hautes-Alpes. Nous alertions sur l’urgence à :
⁃ accueillir dignement les personnes contraintes de fuir leur pays où elles ne sont plus en sécurité ;
⁃ refuser de traiter ces personnes comme des criminels ou des animaux nuisibles ;
⁃ empêcher que nos mers et nos montagnes se transforment en cimetières.
6 ans plus tard, nous faisons les mêmes constats. Les violences d’Etat contre les personnes exilées ne cessent de se renforcer jusque dans le Briançonnais, tandis que les fléaux qui contraignent les populations à fuir leur pays se multiplient. L’exception envers les personnes de nationalité ukrainienne a montré qu’il est possible d’accueillir dignement, tout en dévoilant le caractère discriminatoire de la politique actuelle.
Ces violations de droits sont documentées et dénoncées par les associations, les organismes indépendants de défense des droits humains, les chercheurs, les journalistes, les parlementaires… Des décisions préfectorales ont été annulées et deux membres de la police aux frontières ont déjà été condamnés par les tribunaux.
Au lieu de respecter les droits fondamentaux, les gouvernements successifs n’ont de cesse de militariser la frontière, pour un coût direct de plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour le seul Briançonnais, soit un gâchis considérable par rapport aux sommes nécessaires à l’accueil digne et au respect du droit.
Cette politique n’engendre que morts et souffrances supplémentaires, les frontières abiment durablement, physiquement et psychiquement, les personnes. Les risques liés à la traversée notamment en saison hivernale sont bien réels (hypothermie, gelure) et sont accentués par la militarisation de la frontière (fuite, cachette, chute). Pour exemple, la nuit du 19 au 20 novembre 2022, 4 personnes ont été blessées à la suite d’un contrôle par surprise en pleine montagne et de la course poursuite qui a suivi, avec une personne hospitalisée à Briançon. Des pratiques humiliantes ont été également rapportées récemment dans le cadre d’enfermement à la police aux frontières de Montgenèvre.
La criminalisation de la solidarité perdure. Le harcèlement, les intimidations, les amendes abusives voire mensongères, les poursuites judiciaires sont toujours de mise envers les solidaires, et ceci malgré nos multiples signalements aux autorités compétentes.
Nous ne baissons pas les bras. Nous continuons notre veille active à la frontière pour réduire les risques, témoigner, dénoncer et alerter les autorités dédiées, le tout pour obtenir des avancées sur le respect des droits à la frontière. Des décisions récentes nous confortent dans notre action. Par exemple, le 22 novembre, après la relaxe des 3+4, deux solidaires ayant subi de la prison viennent d’obtenir réparation en justice. Le 23 novembre, la Cour européenne des droits de l’Homme a accepté d’instruire la requête que nous avons déposée au côté de la famille de Blessing Matthew pour que vérité et justice soient faites.
Nombre de personnes agissent au quotidien de manière humaine, professionnelle et sans discrimination, à l’exemple des personnels soignants de l’hôpital de Briançon, avec discernement à l’exemple de certains membres de force de l’ordre, et même avec courage pour celles et ceux qui osent désobéir à des ordres illégaux, illégitimes, dangereux et barbares.
Avec les associations et collectifs impliqués et la population solidaire, nous montrons chaque jour qu’un autre accueil est possible, que tout le monde en profite, y compris l’économie locale. Aujourd’hui plus que jamais le Briançonnais est reconnu dans le monde entier comme une terre d’accueil.
Cette renommée n’a rien à voir avec le pseudo « appel d’air » que les pouvoirs publics et l’extrême droite agitent comme un épouvantail dont les chercheurs ont démontré la vacuité. Par exemple, par comparaison avec Montgenèvre, le nombre de refoulements effectués par la PAF est presque deux fois plus élevé à Modane et dix fois plus à Menton, alors qu’il n’y a pas de lieux d’accueil sur ces deux territoires.
Depuis nos montagnes qui ont toujours été des lieux de passage, d’asile mais aussi d’exil, nous nous unissons pour sensibiliser sur les préjugés tenaces autour de la migration mais également pour changer ces politiques mortifères et à fort relent raciste et xénophobe.
Dimanche 18 décembre, à l’occasion de la Journée internationale des migrants, des manifestations sont organisées en France, en Europe et au-delà. Opposés à cette politique du rejet, nous avons fait le choix de la dignité et de l’humanité.
À Briançon, avec toutes les associations et collectifs impliqués dans l’accueil des personnes exilées, nous vous donnons rendez-vous :
⁃ à 15h30, devant la médiathèque pour une déambulation en fanfare jusque devant la MJC, avec des prises de parole ;
⁃ à partir de 17h, devant la MJC, avec les stands des associations et des boissons chaudes ;
⁃ à 18h30, à l’Eden-Studio pour la projection-débat des films documentaires 18 mois, puis à 21h Ceux de la nuit, en présence des réalisatrices et de personnes impliquées.
Paris, le 13 décembre 2022
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