Nous, associations et fédérations accompagnant des personnes en situation de précarité et collectifs citoyens de soutien aux personnes migrantes/exilées, ne cessons de constater et d’alerter sur l’augmentation du nombre de personnes, de femmes, de familles et de mineurs non accompagnés à la rue, vivant en squats, en bidonvilles ou en campements dans des conditions sanitaires et sociales indignes.
C’est pourquoi, nous dénonçons :
- le manque de volonté politique et de moyens pour respecter le principe d’accueil inconditionnel, socle fondamental de solidarité vis-à-vis des personnes en situation de précarité en France ;
- le durcissement actuel des conditions d’accès à l’hébergement et aux droits fondamentaux dont sont victimes les familles et les personnes qui demandent protection à la France ou qui fuient des conditions de vie inhumaines.
La dégradation des conditions d’accueil et d’accompagnement des personnes et des familles les plus vulnérables devient une méthode des autorités pour décourager la demande d’asile.
Les personnes sans abri, isolées ou en famille sont victimes de discrimination pour l’accès ou le maintien dans les structures d’hébergement généralistes, à la demande de l’Etat et en violation du principe d’accueil inconditionnel. Le « tri » des personnes qui sollicitent un hébergement se généralise dans le territoire, laissant à la rue et sans soins des familles, parfois avec des enfants malades, comme cela a été récemment dénoncé par les associations à Caen ou Brest.
Malgré l’obligation d’hébergement et d’accompagnement des demandeurs d’asile, moins d’une personne sur deux est aujourd’hui hébergée dans le Dispositif National d’Accueil (DNA). Une situation qui résulte d’un manque structurel de places d’hébergement (90 000 places dans le DNA pour 180 000 personnes dont la demande d’asile est en cours d’instruction ou récemment réfugiées) et qui alimente le développement des squats et des campements indignes, comme à Paris, Saint-Denis, Nantes, Strasbourg, Toulouse, Bordeaux…
Par ailleurs, au nom de la « fluidité » dans les structures d’hébergement, l’OFII demande même aux centres d’hébergement de mettre fin à la prise en charge des personnes et des familles ayant obtenu l’asile ou en situation de détresse, sans solution de relogement. Ici non plus, le gouvernement n’atteint pas ses objectifs (8 700 relogements réalisés en 2018 contre 16000 promis) qui nécessite aussi un engagement fort des collectivités locales.
Cette politique a pour conséquence de maintenir un cycle infernal aboutissant à plus de personnes à la rue.
Ce durcissement des conditions d’accès à l’hébergement et aux droits fondamentaux n’est pas une fatalité. Nous déplorons le manque de volonté politique et de moyens pour respecter le principe d’accueil inconditionnel qui fonde la tradition de solidarité vis-à-vis des personnes en situation de précarité en France.
Face à la dégradation constatée des politiques d’accueil et d’hébergement, les fédérations, associations et collectifs citoyens s’unissent pour demander au gouvernement le respect de la loi et des droits fondamentaux de toutes et tous, dont font partie les plus vulnérables :
- une protection et un hébergement d’urgence, immédiats et inconditionnels des personnes en errance dans différentes villes de France, leur permettant d’accéder à leurs droits fondamentaux ;
- un accès rapide aux procédures de demande d’asile, dans le respect des délais définis par les textes, y compris pour les personnes sous procédure Dublin, ainsi qu’aux conditions matérielles d’accueil ad hoc ;
- l’accès aux conditions matérielles d’accueil (hébergement, ADA, accompagnement dans les procédures et l’accès aux droits) tel que prévu par les textes européens pour tous les demandeurs d’asile, la création de 40 000 places d’hébergement et l’abandon des orientations directives des demandeurs d’asile vers les régions sans garantie d’hébergement qui auront très bientôt pour conséquence la création de nouveaux campements ;
- l’assurance d’une continuité de l’hébergement pour toutes les personnes sans domicile fixe, quelles que soient leurs situations administratives, qu’il s’agisse de structures dédiées aux demandeurs d’asile ou de structures d’hébergement généraliste ;
- la garantie de conditions d’hygiène dignes (sanitaires, urinoirs, accès à l’eau, gestion des déchets), arrêt des confiscations de matériels tant que les campements perdureront ;
- la protection des personnes vulnérables face aux réseaux de passeurs, de trafiquants et de traites des êtres humains.
Nous, associations et fédérations accompagnant des personnes en situation de précarité et collectifs citoyens de soutien aux personnes migrantes/exilées, demandons une réponse forte, nationale, interministérielle (santé, logement, intérieur) et des mesures immédiates, en lien avec les collectivités locales pour en finir avec ces situations inhumaines.
Le 27 juin 2019
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Signataires :
ACAT ; Actions Traitements ; Althéa Grenoble ; Amnesty International France ; ARDHIS ; Association Accueil de Jour ; Association le relai Ozanam ; Association Oiseau Bleu ; Auberge des migrants ; Aux Captifs la Libération ; CDJM 77 ; CEDIS ; Chorba ; Cimade ; CNDH Romeurope ; Collectif les Morts de la rue ; Comede ; DALO ; Dom’Asile ; EGM Paris ; Emmaüs France ; Emmaüs Solidarité ; Europe Migrante et Solidaire ; Fédération des acteurs de la solidarité ; Fédération de l’entraide protestante ; Fédération Nationale des Samu Sociaux ; Fédération Santé et Habitat ; Fondation Abbé Pierre ; Fondation Armée du Salut ; France Terre d’Asile ; Français langue d’accueil ; Jesuit Refugee Service France ; Ligue des droits de l’Homme ; Médecins du Monde ; Médecins sans frontières ; MRAP – Fédération de Paris ; Première Urgence Internationale ; Primo Levi ; P’tits Dej Solidaires ; Sant’ Egidio ; Secours Catholique-Caritas France ; Solidarité Migrants Wilson ; UNAFO ; UNHAJ ; Union Nationale des CLLAJ ; Vestiaire pour les migrants.