Communiqué commun
Ligue des droits de l’Homme (LDH), Syndicat des avocats de France (Saf), Syndicat de la magistrature (SM)
Les 30 et 31 mars, le Sénat examinera la proposition de loi « renforçant la lutte contre le système prostitutionnel ».
Le délit de racolage passif pourrait être maintenu, et la pénalisation des clients introduite dans l’arsenal répressif.
Ces dispositions sont tout à la fois dangereuses et inefficaces.
Dangereuses, parce que l’instauration d’un délit de racolage contraint les personnes prostituées à la clandestinité pour éviter les contrôles de police, accroît leur vulnérabilité en les rejetant vers des lieux isolés et précaires, en les laissant à la merci des clients violents, et contribue à la dégradation de leur état de santé. De toute évidence, la pénalisation des clients aura exactement le même effet, puisque les prostitué-e-s chercheront à leuréviter la verbalisation.
Dangereuses, encore, parce que cette pénalisation s’attaquant à la prostitution de voie publique, encouragera la prostitution « indoor », qui favorise l’isolement des prostitué-e-s et les prive ainsi d’accès aux services et associations susceptibles de les aider.
Inefficaces, parce que les prostitué-e-s arrêté-e-s pour racolage ne dénoncent pas leurs proxénètes etqu’au contraire la multiplication des contrôles les conduit à se méfier de la police. Quant à leurs clients, ils ne seront pas en mesure de dénoncer des réseaux dont ils ignoreront tout. Or la lutte contre les réseaux de traite et le proxénétisme doit être la priorité absolue.
Nos organisations réaffirment que, s’agissant d’éducation et de sensibilité à l’égalité entre les êtres humains, le droit pénal, qui n’est pas le droit de la morale, ne peut être la solution.
Nous appelons donc les sénateurs à abroger le délit de racolage et à refuser d’introduire la pénalisation du client dans le Code pénal.
Paris, le 30 mars 2015