Sélectionné au Festival de Toronto
Ce premier film du jeune réalisateur franco-algérien, Damien Ounouri, retrace le parcours de son grand-oncle, EL Hadi, pendant la guerre d’indépendance algérienne. Emigré en France, il a participé à la lutte clandestine et intégré un groupe armé au sein de la Fédération de France du FLN. Ce qu’il a vécu à cette époque, il n’en a pas parlé par la suite, mais il a accepté la demande de son petit-fils de revenir sur ce qu’il a fait, y compris une tentative de meurtre et un meurtre, suite aux ordres qu’il avait reçus de ses chefs. Il revient aussi sur son emprisonnement, puis son expulsion en 1962, l’année de l’indépendance algérienne. Revenir ainsi, à 70 ans, sur cette partie obscure de son existence n’est pas simple pour El Hadi. Il refait les gestes qu’il avait fait alors, répond aux questions de son petit-fils sur la guerre d’indépendance en général et sur les formes violentes qu’elle a prise. Sur la légitimité de cette guerre, il n’a aucun doute aujourd’hui. Mais sur les formes autoritaires et fratricides qui ont conduit à des assassinats, même s’il dit n’avoir aucun regret, un malaise qu’il ressent alors vient peut-être exprimer des interrogations refoulées. Ce film, sous la forme du portrait chaleureux d’un vieil homme fier de son engagement d’hier, dit aussi la difficulté de rester humain dans une situation de guerre.
Comme l’explique le réalisateur :« Ce que l’Histoire retient des guerres, ce sont des chiffres, des faits marquants et des légendes. Mais ce qu’ont réellement vécu ses participants, leur quotidien, leurs histoires personnelles, leurs sentiments, ne nous sont pas transmis. En empruntant un chemin plus sensible et humain, qui part de l’individu pour aller vers les grands évènements, je veux donc leur redonner une identité. Petit, je questionnais souvent mon père sur son oncle El Hadi, un de ces nombreux soldats ordinaires qui ont combattu pour une Algérie indépendante. Les anciens cultivant un certain silence vis-à-vis de cette période, son histoire ne m’était révélée que par bribes, et mon imagination la comblait de toutes sortes d’aventures. En recréant son itinéraire pendant la révolution algérienne, écoutant sa parole et celle des personnes qu’il rencontre, sur les différents lieux-dits de ses actions en Algérie et en France, El Hadi revit ces années sombres, dans un dialogue entre son histoire personnelle et l’histoire officielle. À travers Fidaï, je souhaite porter un regard nouveau sur la révolution algérienne. Face à la disparition croissante de ses acteurs, il est urgent de construire une mémoire qui lie l’intime au collectif, ma génération à celle des anciens, et favoriser la transmission. »
Fidaï
Film documentaire, France, Algérie, Chine, Allemagne, Koweït, 2012
Durée : 82 mn
Réalisation : Damien Ounouri
Distribution : Les Films de l’Atalante
Production : Kafard Films