La France devant le Comité des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes : regard sur un état de droit

Au cours des cinq années écoulées, il n’a pas été difficile de relever les vives critiques émises par les Nations unies toutes les fois où la France a dû être auditionnée devant les différents comités chargés de contrôler la bonne application des conventions internationales auxquelles ils se rattachent : droits de l’enfant, lutte contre les discriminations raciales, droits économiques et sociaux, etc. Les droits des femmes n’ont pas échappé à l’examen onusien.



Le 18 janvier 2008, le comité d’experts examinait le 6e rapport périodique de la France. Au terme de cet examen, le Comité a fait part de ses préoccupations et a formulé un certain nombre de recommandations qui constituaient un plan de travail intéressant pour les années à venir, particulièrement concernant les femmes migrantes, la traite des êtres humains, les violences envers les femmes ainsi que l’égalité femmes-hommes sur le marché du travail. Las, aucun droit de suite n’a réellement été exercé, aucun suivi médiatique ne s’est mis en place.

Ainsi, s’agissant de la situation des femmes migrantes, le comité s’était dit préoccupé par « les nouvelles lois et politiques restrictives sur l’immigration qui rendent difficile, pour beaucoup d’immigrées, l’obtention d’un titre de séjour ». En 2013, la situation est toujours difficile. Dans le cadre des dossiers de violences conjugales, et ce malgré la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites aux femmes, le droit ou le maintien du droit au séjour reste problématique car subordonné au pouvoir d’appréciation des préfets. En conséquence, les femmes étrangères se retrouvent face à des exigences de documents qui ne sont pas légalement requis ou bien à des préfectures qui refusent de prendre le dossier complet. De même, concernant le droit d’asile, déposer une demande d’asile et obtenir le statut de réfugié sur le fondement des persécutions liées au genre s’avère particulièrement compliqué. Et si ces obstacles ont pu être surmontés, les femmes étrangères se verront rarement reconnaître réfugiées mais plus souvent auront l’octroi de la protection subsidiaire, dispositif beaucoup moins protecteur.

Nous pouvions espérer mieux concernant les violences faites aux femmes. Le comité des Nations Unies avait souhaité, en 2008, disposer de plus d’informations sur les mesures prises et mises en œuvre dans ce domaine. La loi de juillet 2010 comportait une avancée avec l’ordonnance de protection, qui permet au juge de prendre dans l’urgence et sans dépôt de plainte des mesures pour protéger les femmes victimes de violences conjugales. Cependant, faute d’information et de formation des personnels de justice, cet outil est très peu utilisé. De fait, le nombre de requêtes déposées demeure faible, et lorsque des dossiers sont déposés, les décisions rendues sont souvent défavorables aux femmes victimes pour cause de mauvaise constitution du dossier. Quant aux délais de tenue des audiences, ils sont inégaux : de 48 heures en Seine Saint Denis jusqu’à deux mois dans d’autres départements. Le résultat aujourd’hui est que la loi n’est pas appliquée. Dans ce contexte, il est essentiel de suivre les travaux de la « Mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences » créée par décret du 3 janvier 2013.

La question de l’égalité femmes-hommes sur le marché du travail avait également suscité des recommandations du Comité qui avait engagé la France à « intensifier son action pour assurer l’égalité effective des chances sur le marché du travail » et prendre des mesures concrètes pour notamment combler les écarts de salaires entre les femmes et les hommes. En pratique, que constatons-nous ? Une législation abondante certes mais un écart toujours important de rémunération entre les femmes et les hommes. En 2011, il était de 27 %. Cinq ans après l’examen de la France, il est temps que les autorités françaises mettent en lumière les mesures concrètes qui sont ou vont être prises pour une effectivité des droits, et cessent d’exposer des généralités, comme cela est trop souvent le cas dans les rapports présentés.

Les 7e et 8e rapports périodiques, regroupés dans un seul rapport, de la France devraient être déposés auprès du comité au cours de cette année 2013 pour un nouvel examen en 2015. Que va-t-il en être cette fois ? Non, la CEDAW ne constitue pas un idéal pour un monde meilleur. Oui, la CEDAW est un standard à partir duquel les autorités françaises doivent impulser une véritable politique de l’égalité femmes-hommes. Alors, faisons le pari que, dans le cadre de cette nouvelle échéance, la France ne sera pas indifférente.

Pour en savoir plus, consultez le Rapport périodique de la France. Point sur les observations finales de la 44e session, analyse succincte de la LDH

Communiqués de la LDH

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